Ce lundi 16 juin, de nombreux étudiants débuteront les festivités du bac en planchant sur leur sujet de philosophie. Or, il existe une bonne solution pour mêler distraction et révisions ce week-end : regarder des films !
Si la philosophie peut d’abord faire penser à une montagne de livres poussiéreux, elle est avant tout, bien qu’on ait tendance à l’oublier, une affaire de quotidien. Saviez-vous que les réalisateurs de Matrix étaient de fins lecteurs de Descartes ? Ou qu’il était possible de relier le héros de Fight Club à Nietzsche ?
Voici cinq grands classiques du cinéma inspirés de textes fondamentaux de la philosophie ! Attention aux spoilers !
#1 Matrix et la Vérité
L’histoire : Programmeur anonyme dans un service administratif le jour, Thomas Anderson (Keanu Reeves) devient Neo la nuit venue. À cheval entre deux mondes, Neo est assailli par d’étranges songes et des messages cryptés provenant d’un certain Morpheus (Laurence Fishburne). Celui-ci l’exhorte à aller au-delà des apparences et à trouver la réponse à la question qui hante constamment ses pensées : qu’est-ce que la Matrice ?
Les Méditations Métaphysiques de Descartes : Pour trouver une vérité qui ne puisse être remise en doute, il faut, selon Descartes, commencer par tout remettre en cause et reprendre chaque chose à la racine. L’auteur émet en effet l’hypothèse de l’existence d’un Malin génie, un être tout puissant capable de nous faire prendre le faux pour le vrai. Or, Morpheus invite Néo à remettre en doute la réalité et à changer de regard sur tout ce qui l’entoure. La réalité d’un homme branché sur la Matrice est-elle autre chose, dans le meilleur des cas, qu’un rêve éveillé ? Neo sera ainsi conduit à suivre les préceptes de Descartes en procédant avec méthode et intuition.
#2 The Hunger Games et la Liberté
L’histoire : Chaque année, le Capitole oblige douze districts à envoyer un garçon et une fille concourir aux Hunger Games, un événement télévisé national au cours duquel les « tributs » doivent s’affronter jusqu’à la mort. Ces jeux sont utilisés comme sanction contre la population pour s’être un jour rebellée, mais aussi stratégie d’intimidation de la part du gouvernement. La jeune Katniss (Jennifer Lawrence), 16 ans, se porte volontaire pour prendre la place de sa jeune sœur dans la compétition.
Discours de la Servitude volontaire de La Boétie : Les régimes dictatoriaux, lorsqu’ils sont mis en place, ne peuvent être maintenus, selon La Boétie, que par la soumission consentie du peuple. En effet, les habitants sont aussi responsables du régime dictatorial que leurs dirigeants car s’ils le souhaitaient vraiment, ils pourraient briser leurs chaînes dans la mesure où ils forment le plus grand nombre. La jeune Katniss dénonce en quelque sorte, en se rebellant, ce qu’expliquait La Boétie : les districts se laissent asservir en se laissant conduire par la peur. Katniss prouve qu’il est possible de gagner sa liberté, qu’elle soit physique ou mentale, lorsqu’on le veut vraiment.
#3 Fight Club et la Construction de soi
Pardon, pour la violation des deux première règles du Fight Club.
L’histoire : Le narrateur (Edward Norton) est un personnage évoluant seul dans une vie médiocre ne suscitant en lui aucun désir, jusqu’à ce qu’il rencontre Tyler Durden (Brad Pitt), homme charismatique, anarchiste, prêchant l’amour de son prochain. Les deux hommes vont alors monter le Fight club, un lieu clandestin où le narrateur va tenter de trouver qui il est réellement.
Ainsi parlait Zarathoustra de Nietzsche : Le personnage principal de Fight Club semble suivre les trois métamorphoses symboliques qu’attribue Nietzsche à la libération d’un esprit : le chameau, le lion et l’enfant. L’homme commence la vie accablé de fardeaux (la lourde charge de l’espoir de Dieu et de la Morale) à la manière d’un chameau – en effet, le narrateur montre au début du film son épuisement d’une vie si conventionnée qu’elle ressemble à un magazine IKEA. Lorsque l’homme souhaite achever la traversée de son désert, il se métamorphose en lion, non seulement en se défaisant de tous ses espoirs mais en les détruisant – ce qu’impose Tyler au narrateur : se libérer de ses chaînes au travers de la violence pour prendre conscience du néant de son existence. Enfin, le lion devient enfant : il repart alors de zéro pour tout recommencer par lui-même – possibilité sur laquelle se referme le film.
#4 Into the Wild : la Culture et la Nature
L’histoire : Tout juste diplômé de l’université, Christopher McCandless (Emile Hirsch), 22 ans, est promis à un brillant avenir. Pourtant, il renonce à l’existence confortable qui l’attend et décide de prendre la route en laissant tout derrière lui. Il va alors apprendre à vivre en totale communion avec la nature.
Discours sur les sciences et les arts de Rousseau : Rousseau s’élève dans son texte contre la culture qui, selon lui, pervertit l’homme et l’éloigne des bonnes moeurs et de la vertu. Selon l’auteur, l’homme naît naturellement bon mais accumule, au cours de sa vie, des connaissances qui lui sont imposées, souvent fausses et l’éloignant de ses instincts premiers. De plus, tous les hommes naissent égaux mais la culture les différencie les uns des autres et crée en eux des sentiments mauvais, tels que la jalousie ou la rivalité. Dans Into the Wild, Supertramp – pseudonyme que le personnage s’est attribué – paraît adopter la philosophie de Rousseau : il se rebelle contre une culture qu’on essaye de lui imposer et qu’il remet fondamentalement en cause. Il choisit alors de se tourner radicalement vers la Nature et de s’éduquer par elle afin de comprendre qui il est véritablement.
#5 American Beauty : le Corps et l’Esprit
L’histoire : La famille Burnham semble être, au premier abord, une famille américaine ordinaire. Pourtant, le manque de communication et la frustration la mènent vite à un dérèglement total. Pour commencer, c’est le père de famille, Lester (Kevin Spacey), qui tombe amoureux d’Angela, la jeune et jolie amie de sa fille.
L’Éthique de Spinoza : Selon Spinoza, tout ce qui se passe sur notre corps se passe également dans notre esprit. S’il se passe quelque chose de bon pour mon corps, il se passera également quelque chose de bon pour mon âme. Ainsi, le père Lester le démontre au cours du film : fasciné par l’amie de sa fille, il se reprend en main en recommençant le sport, en faisant attention à lui. Dès lors, lui qui ne supportait plus son quotidien devient un homme actif, épanoui et, surtout, heureux. Selon Spinoza, le corps et l’esprit sont « une seule et même chose ». Le personnage le prouve : plus son corps se raffermit, plus ses idées évoluent dans la même direction.